
DJ Mehdi : réussir sa transition (7/10)
09/13/21 • 7 min
La transition de DJ Mehdi vers la musique électronique, elle s'est faite de manière progressive, entre la fin des années 90 et le début des années 2000.
Lui qui est pourtant réputé produire les choses à l’instinct et avec rapidité va mettre longtemps avant d’assumer sortir son premier album en son nom, sur son propre label, qu’il appelle Espionnage en hommage à John le Carré. Ce label pourtant c’était déjà un premier pas vers l’indépendance, en tout cas il l’imaginait comme une carte de visite pour présenter la variété de ses goûts et de ses productions. Un endroit où il osait déjà héberger des créations hybrides, surprenantes, certains vieux amis et d’autres choses plus futuristes.
Mais oser passer de l’ombre à la lumière, pour de vrai, ce n’est pas simple. Et c’est finalement en 2002 que sort ce disque, The Story of Espion - qui est l’histoire d’un infiltré, d’un caméléon qui tente pour la première fois se montrer sous ses vraies couleurs pour dire son amour pour les mélodies, les entrelacs musicaux. Mais il n’avance pas seul, il s’arme de quelques featurings, avec Diam’s, Rim'k, Karlito. Et s’il se perd un peu, c’est peut-être parce qu’il essaie de concilier les deux publics, en espérant plaire à deux mondes qui à l’époque, à part dans quelques sphères un peu puristes, se tournent le dos : le hip hop et l’électro.
Ce disque ne marche pas comme il l’espère, et lui restera longtemps en travers de la gorge.
Pudiquement, DJ Mehdi l’évoquera comme un regret, sans préciser ce qu’il a regretté. Il dira à d’autres moments que malgré l’échec commercial cet album correspond à une époque de grand bonheur et de libération qui ne s’oublient pas. Et puis sans lui, Lucky Boy ou Megalopolis - qui feront sa joie et son succès quelques années plus tard - n'existeraient pas.
Avec le recul, on peut aussi se demander si le public français n’était pas trop divisé pour aimer une œuvre de synthèse comme celle-ci. Mine de rien, réunir dans un seul et même disque deux univers musicaux à ce point étranger l’un à l’autre, c’était une démarche de pionnier.
En tout cas, après ce premier album, Mehdi prend un peu de temps et la décision de se réinventer pour de vrai. Et c’est pas grave si ses amis du 113 se moquent de lui quand il porte une petite veste cintrée qui brille et une barbichette. Il apprend à assumer qu’il fait partie d’un nouveau monde, d’une hype qu’il a sans doute raillée quand il était plus jeune. C’est comme s’il était nécessaire pour lui de s’éloigner un peu de son passé. C’est en à partir de ce moment là, en tout cas qu’il commence sincèrement à prendre plaisir en tant que DJ de clubs, associé à Ed Banger.
À même pas 25 ans, DJ Mehdi commence vraiment sa seconde vie, et s’apprête à devenir le Lucky Boy qui nous a tous fait danser. Mais ça on le raconte dans le prochain épisode. En attendant, on écoute un morceau évocateur de ce premier album : Breakaway qui parle de rupture et d’échappée belle.
Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.
La transition de DJ Mehdi vers la musique électronique, elle s'est faite de manière progressive, entre la fin des années 90 et le début des années 2000.
Lui qui est pourtant réputé produire les choses à l’instinct et avec rapidité va mettre longtemps avant d’assumer sortir son premier album en son nom, sur son propre label, qu’il appelle Espionnage en hommage à John le Carré. Ce label pourtant c’était déjà un premier pas vers l’indépendance, en tout cas il l’imaginait comme une carte de visite pour présenter la variété de ses goûts et de ses productions. Un endroit où il osait déjà héberger des créations hybrides, surprenantes, certains vieux amis et d’autres choses plus futuristes.
Mais oser passer de l’ombre à la lumière, pour de vrai, ce n’est pas simple. Et c’est finalement en 2002 que sort ce disque, The Story of Espion - qui est l’histoire d’un infiltré, d’un caméléon qui tente pour la première fois se montrer sous ses vraies couleurs pour dire son amour pour les mélodies, les entrelacs musicaux. Mais il n’avance pas seul, il s’arme de quelques featurings, avec Diam’s, Rim'k, Karlito. Et s’il se perd un peu, c’est peut-être parce qu’il essaie de concilier les deux publics, en espérant plaire à deux mondes qui à l’époque, à part dans quelques sphères un peu puristes, se tournent le dos : le hip hop et l’électro.
Ce disque ne marche pas comme il l’espère, et lui restera longtemps en travers de la gorge.
Pudiquement, DJ Mehdi l’évoquera comme un regret, sans préciser ce qu’il a regretté. Il dira à d’autres moments que malgré l’échec commercial cet album correspond à une époque de grand bonheur et de libération qui ne s’oublient pas. Et puis sans lui, Lucky Boy ou Megalopolis - qui feront sa joie et son succès quelques années plus tard - n'existeraient pas.
Avec le recul, on peut aussi se demander si le public français n’était pas trop divisé pour aimer une œuvre de synthèse comme celle-ci. Mine de rien, réunir dans un seul et même disque deux univers musicaux à ce point étranger l’un à l’autre, c’était une démarche de pionnier.
En tout cas, après ce premier album, Mehdi prend un peu de temps et la décision de se réinventer pour de vrai. Et c’est pas grave si ses amis du 113 se moquent de lui quand il porte une petite veste cintrée qui brille et une barbichette. Il apprend à assumer qu’il fait partie d’un nouveau monde, d’une hype qu’il a sans doute raillée quand il était plus jeune. C’est comme s’il était nécessaire pour lui de s’éloigner un peu de son passé. C’est en à partir de ce moment là, en tout cas qu’il commence sincèrement à prendre plaisir en tant que DJ de clubs, associé à Ed Banger.
À même pas 25 ans, DJ Mehdi commence vraiment sa seconde vie, et s’apprête à devenir le Lucky Boy qui nous a tous fait danser. Mais ça on le raconte dans le prochain épisode. En attendant, on écoute un morceau évocateur de ce premier album : Breakaway qui parle de rupture et d’échappée belle.
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DJ Mehdi : le prince des villes (6/10)
En 1997, les Daft Punk sortent l’album Homework. Comme beaucoup, DJ Mehdi tombe sous le charme. Qui sont ces deux types qui samplent Barry White, les Bar Kays, Billy Joel et qui dans la chanson ‘Teachers’ citent Dr Dre et George Clinton à côté de Paul Johnson ou Lil Louis ? Eux qui produisent sur le même genre de machines n’en arrivent pas du tout au même résultat. Mais alors à quel moment leurs chemins divergent ?
Cette question là, Mehdi commence à se la poser à la fin des années 90, et quand il réalise que c’est notamment une question de tempo il propose à Manu Key de produire des instru qui ne vont plus à 96 bpm mais qui montent à 120 battements par minutes. Mais il y a plus de 20 ans, en France, ce n’est pas le genre de truc qui se faisait.
Alors Mehdi commence à composer dans son coin des morceaux instrumentaux, ultra filtrés, pour le plaisir de la nouveauté et parce qu’il a envie de les faire écouter aux DJ qu’il fréquente. Zdar, Bangalter, Boombass les trouvent super.
Mais ils ne sont pas les seuls : quand Mokobé et Rim’k du 113 les découvrent, ils veulent rapper dessus, parce qu’ils aiment cette manière très digitale de découper les samples. Pour leur premier album, ils veulent sortir un disque de rap qui surprend et ce sera le cas avec Les Princes de La Ville. Quand on disait à DJ Mehdi qu’il avait eu cette idée géniale de mélanger le rap et les sonorités électro, il tenait à préciser que ce n’était pas de son fait, mais de celui du 113. C’est comme ça qu’est né l’album des Princes de la Ville, qu’on peut écouter comme une sorte de testament laissé par DJ Mehdi au rap français.
Quand le disque du 113 sort, et que le groupe déboule aux victoires de la musique en peugeot 504 break chargé, DJ Mehdi est évidemment heureux de partager ce succès avec ses amis d’enfance. Mais il a déjà un pied ailleurs, il aime traîner aux soirées Respect au Queen, il rêve sincèrement de jouer à Ibiza et devant un public de fêtards.
C’est ce chemin qu’il a parcouru qui va causer la fin d’Ideal J ; il n’y a pas eu de fâcherie, il y a simplement eu un fossé qui n’a cessé de se creuser avec le temps. Au bout d’un moment, quand des rappeurs lui demandaient des instrus, il leur présentait des morceaux rapides, syncopés, filtrés. Le genre de trucs qu’il avait envie de produire à l’aube de l’an 2000, mais qu’aucun rappeur français de l’époque n’avait vraiment envie d’assumer.
C’est comme ça que les choses arrivent et que les pages se tournent. Après ça, la seconde vie de DJ Mehdi a commencé, et on en parlera dans la suite de cette nova story.
Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.
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DJ Mehdi : le Lucky boy (8/10)
En 2003, la Mafia k1 Fry sort son premier album collectif : La Cerise sur Le Ghetto. Tout le monde est là : Manu Key, le 113, Intouchable, Rohff, Teddy Corona. Même Kery James a fait le déplacement. Seul manque à l’appel DJ Mehdi. Dans le DVD qui accompagne l’album, le fameux Si Tu Roules avec la Mafia il s’en explique un peu :
Après ça, la Mafia k1 fry se moque gentiment de lui, et de ses sons trop rock’n’roll. Mais c’est comme ça : l’énergie créative qui lui reste, Mehdi a envie de la mettre ailleurs. Il veut écrire sa vie avec une autre bande-originale et une autre bande de potes, qui sont les gars d’Ed Banger ou de Kourtrajmé. Entre eux, ils s’appellent entre eux les PDK (Professionnels du Kiff) et les PDV (Professionnels du Voyage) - et ils n’ont pas tort.
Pour lui, les choses bougent vite au début des années 2000 : il bosse avec Keziah Jones, Matthieu Chedid, Asian Dub Foundation, il collabore avec Desplechin sur la bande-originale de Rois et Reines, compose celle de Sheitan, Taxi 3, Mégalopolis, il traîne avec la clique de Kourtrajmé. Et c’est grâce à un autre CD/DVD, qui sort 2 ans après celui de la Mafia k1 fry, qu’on peut mesurer la distance qu’il a parcouru. C’est l’époque ‘Des friandises pour ta bouche’ : une bande-son qu’il compose par pur plaisir, sans ambition commerciale, artistique, acoustique. Juste, Mehdi essaie de partager la musique qu’il a dans sa tête, et l’esthétique de Kourtrajmé ressemble davantage à sa vie.
Et puis en 2006 - il sort un deuxième album en son nom. Cette fois il ne se considère plus comme un espion mais comme un type qui a eu une chance folle d’en arriver là. “Lucky Boy” : c’est le nom de ce disque dont la pochette, iconique, est dessinée par So-Me. Pendant 45 minutes, DJ Mehdi se présente tel qu’il est. Inclassable. On entend de la funk, des nappes digitales. Et quand les gens lui demandent comment il qualifierait ce disque, il l’affirme. C’est un disque de hip-hop, un disque de breakdance. Parce que, dit-il, le hip hop des années 2000 c’est ça, c’est un son nouveau. D’ailleurs, Booba ne s’y trompera pas en lui demandant de faire l’instru de ‘Couleur Ebène’ en 2006.
Et c’est grâce à cette vision, cette modernité qu’on entendait peu en France à l’époque que DJ Mehdi va s’imposer aussi à l’internationale. Mais ça, c’est une autre histoire, qu’on vous raconte au prochain épisode.
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