Judith Aquien, Trois Mois Sous Silence

07/17/21 • 3 min

Une fois de plus, l'intime est politique.

Et questionner ce silence attendu qui entoure les trois premiers mois de la grossesse (que ce soit par superstition, convenance ou réelle envie), c'est finalement aussi s'attaquer à un tabou systémique et à une nouvelle injonction faite aux femmes. Avant ma grossesse, je ne m'étais jamais interrogée sur cette "règle" tacite. Mais, ne pas en parler, c'est en fait encore faire reposer une charge mentale sur les femmes qui devront gérer leur tristesse, leur état, seules et sans pouvoir l'expliquer au travail ou dans leur quotidien.

En France, on estime à 20 000 environ le nombre de fausses couches chaque année. Ce risque pèse de tout son poids tout au long du fameux premier trimestre. La preuve, ce n’est qu’à la fin de ces trois mois, qu’on se verra décerner un certificat de grossesse. Pourquoi ? Une grossesse dure 9 mois. Pourquoi se taire et faire comme si ces trois mois ne comptaient pas. Personnellement, pendant ces 3 mois, j'ai éprouvé une excitation intense en voyant le résultat du test, puis la peur de l'inconnu et de l'arrêt de la grossesse justement, une envie de vomir aussi fréquente que mon envie de fumer (du moins au début, après ça m'a dégoûtée) et je me suis même parfois privée de sorties le premier mois pour ne rien dévoiler. Et puis, pour certain.e.s proches, nous n'avons pas respecté le délai et avons annoncé la nouvelle à 6 semaines. Et j'ai été soulagée. Parce que, de toute façon, si ça ne se passait pas bien, j'aurais envie de partager cela avec les gens qui me sont chers.

Alors bravo à Judith Aquien de participer à libérer vraiment la parole en la portant haut et fort, hors d'un cercle restreint, avec ce livre manifeste. Témoignages, chiffres, retour sur les mythes fondateurs de notre société, analyse du sexisme au travail ou dans le monde médical, le texte est facile à lire, pertinent et important. En plus, il est magnifiquement préfacé par Camille Froidevaux-Metterie.

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Une fois de plus, l'intime est politique.

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Gisèle Halimi, Une Farouche Liberté

Il y a des livres qu'on a du mal à refermer, des personnes à qui on ne sait pas dire au-revoir.

Une farouche liberté et Gisèle Halimi sont de ceux-là. Quelle femme extraordinaire ! On voudrait l'entendre parler encore et encore.

Ce livre d'entretien réalisé avec Annick Cojean (journaliste au Monde et autrice des entretiens passionnants et inspirants Je ne serai pas arrivé là si...) revient sur son parcours et sur ses convictions. Faut-il rappeler que cette avocate admirable fut, suite au procès de Bobigny et avec son association "Choisir" à l'origine de la loi Veil et que ses combats pour les droits des femmes ont notamment permis de remanier la définition du viol en 1980 ou encore de lutter pour l'égalité professionnelle et pour une participation équitable des femmes dans la vie publique par la parité.

Une vie d'engagement inspirante et une parole essentielle qu'il faut lire intégralement car il a été très dur d'en choisir les extraits ! Elle avait 93 ans quand elle a répondu à ces questions et l'indignation, le refus de l'ordre établi est toujours là. C'est ce qui me fascine chez elle. Son courage et son incroyable liberté. Elle abhorre les clichés, elle réfute les diktats, elle semble tout questionner, prête à tout remettre en cause face à une injustice.

Une vraie héroïne féministe dont les mots puissants motivent à ne jamais se résigner.

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Maïa Mazaurette, Sortir du trou-lever la tête

C'est l'été, parlons corps, parlons sexualité.

En la matière, la journaliste Maia Mazaurette est une experte. Dans cet essai en deux parties, sa plume légère et pleine d'humour nous propose de "sortir du trou" et de "lever la tête", soit de sortir d'une vision de la sexualité centrée sur la pénétration pour privilégier une pratique du sexe aussi déconstruite que décomplexée et la jouissance de toustes ! Un programme attrayant, non ?

Cet extrait parle du regard, de notre façon de regarder nos corps et ceux de nos partenaires, célèbre la puissance de nos sexes et de nos corps et invite même à une forme de contemplation. J'aime beaucoup la proposition qu'elle écrit, également dans le livre: "il parait plus tenable dans le temps de ne pas considérer la beauté de l'autre comme celle d'une statue de marbre, ou comme acquise".

Je vous souhaite donc une belle fin d'été, les yeux grands ouverts !

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